Par Jacques Herman
Au 5e siècle, la date de naissance de Jésus est fixée au 24 décembre, trois jours après le solstice d’hiver, lorsque la durée de la lumière du jour augmente, et celle de Jean Baptiste le 24 juin, trois jours après le solstice d’été, lorsqu’elle diminue. L’Eglise catholique romaine illustre ainsi le propos du Baptiste au sujet de Jésus: «Il faut que lui croisse, et que moi je diminue» (Jn 3, 30), mots que reporte, dans leur traduction latine, le retable d’Issenheim de Matthias Grünewald: «Illum oportet crescere me autem minui».
Le Précurseur, né d’une femme trop vieille pour enfanter, est rempli du Saint-Esprit et le Messie, né d’une vierge, est conçu du Saint-Esprit. L’Eglise «recouvre» ainsi les deux grandes fêtes solsticiales païennes d’origine celte.
Claudine Gauthier, docteur en ethnologie qui fait autorité dans le domaine de l’anthropologie des messianismes, souligne la symétrie rigoureuse entre le Baptiste et Jésus comme une opposition complète qui les ramène à l’unité et en fait des quasi-jumeaux.
Peu importe qu’il s’agisse ou non de la christianisation d’un vieux rite païen. Ce que l’image traduit est de portée universelle et transcende tous les référentiels typologiques: elle met en exergue le nécessaire amoindrissement de soi pour rendre possible l’accueil de Dieu en soi.
Comme les étoiles qui, le jour ne se montrent jamais, la lumière — en l’occurrence la lumière divine — ne doit sa perceptibilité que dans l’effacement progressif du moi.